Le financement des DNVB

Après l’âge d’or des marketplaces puis celui des plateformes de mise en relation, assiste t-on aujourd’hui à celui des DNVB (« Digitally Native Vertical Brands ») ?


Ecosytème startup
Publié le 25/11/2020

L’acronyme "DNVB" a été inventé par Andrew Dunn pour décrire le business model de son entreprise Bonobos, créée en 2007 avec Brian Spaly et rachetée depuis par Wallmart. On retrouve ce terme pour la première fois dans un article publié par Andrew Dunn en mai 2016 sur la plateforme Medium, intitulé Le futur du retail : l’essor du V-Commerce.

Depuis, il désigne par extension des entreprises comme Bonobos créées par et pour des millenials, basées sur des business model « direct to consumer ». Les piliers des DNVB sont au nombre de quatre : expérience client, obsession de la qualité, puissance de la marque et valeurs engagées. Ces startups se distinguent également de leurs aînées par une communication spécifiquement pensée pour les réseaux sociaux afin de renforcer cette relation si particulière avec leurs clients. Nées aux Etats-Unis, les DNVB se sont depuis exportées en Europe, et notamment en France avec Tediber (1,8m€ levés), Sézane (une levée au montant non dévoilé), Le Slip français (10m€), Jimmy Fairly (200 000€), Gemmyo (4m€) ou encore Bergamotte (6,2m€) pour ne citer qu’eux.

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« Ce sont des entreprises qui ont su casser les rapports top down entre la marque et le client. Elles représentent les premières marques de produits sur le web, qui ont réussi à tirer le meilleur des outils digitaux en créant une communauté, et une expérience unique et égalitaire avec le client », explique à Bpifrance Sébastien Tortu, auteur du livre DNVB : le (re)nouveau du commerce : Entre web & retail, comment les DNVB changent les règles du jeu.

Si les DNVB étaient initialement présents sur des secteurs présentant une forte pénétration en ligne comme la literie ou l’ameublement, elles se sont rapidement lancées à l’assaut de marchés offrant des fréquences d’achats élevées (abonnement, essai à domicile…).Pour gagner en légitimité et en visibilité, elles se sont rassemblées au sein de l'association France DNVB, à l’initiative de Julien Sylvain, le fondateur de Tediber. 

Les investisseurs, qui voient d’un très bon œil cette structuration, misent de plus en plus sur ces startups, malgré leur importante structure de coûts en phase de croissance. C’est le constat que dresse la dernière étude à ce sujet menée par le cabinet Clipperton et intitulée "Digital native vertical brands, terme en vogue ou nouvelle classe d'actifs ?". Clipperton s’y penche sur l'origine du capital de 700 DNVB, dont 361 aux Etats-Unis et au Canada, 101 en France et le reste en Europe. 

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Évolution du financement international des DNVB (source : Clipperton)

Grâce à une pénétration rapide de leurs marchés respectifs, les DNVB n’ont pas tardé à attirer les investisseurs. Leurs principaux atouts :

  • la verticalisation de toute la chaîne de valeur, permettant aux DNVB de capter une part plus importante des profits et augmentant ainsi leurs marges jusqu’à deux fois plus que les autres plateformes de e-commerce traditionnelles ;
  • une gestion des opérations strictement orientée autour de la data, souvent couplée à un modèle économique privilégiant la répétition et la rétention (comme les abonnements) capables de s’assurer des indicateurs économiques sains (faible CAC ou ratio CAC/LTV élevé).

En conséquence, les DNVB ont pu capitaliser sur l’attrait des investisseurs, avec un pic à 3,3 milliards de dollars en 2018. Si les Etats-Unis restent la locomotive du financement des DNVB, l’Europe n’échappe pas non plus à cette envolée puisque les DNVB représentaient le quart des investissements liés à l’Internet B2C cette même année, contre 11% en 2014. Clipperton constate également une augmentation du volume des opérations, un indicateur clé de l’intérêt immuable des investisseurs ainsi que de la maturité croissante des acteurs : depuis 2015, plus de 17 deals ont dépassé les 100 millions d’euros. 

Outre les traditionnels investisseurs du capital-risque qui ont su repérer l’opportunité à ses débuts et se sont vite intéressés aux DNVB (Index Ventures, Kima Ventures, IVP, NEA), la tendance a aussi eu pour conséquence la création d’entités dédiées spécifiquement à l’investissement dans les DNVB (Experienced Capital, Forerunner, Lerer Hippeau). En France, on citera notamment le lancement par le fonds d'investissement Eutopia d’un fonds de 50 millions d'euros à cet effet fin 2019. 

Si les DNVB ont su tirer parti de leur popularité pour s’imposer sur les différents marchés et se financer, ils restent confrontés à de sérieux défis qui les empêchent pour l’instant d’atteindre une taille plus importante. Le premier d’entre eux, et pas des moindres : des difficultés à mener leur internationalisation en raison de barrières limitées à l’entrée et la présence de “copycats” sur le marché. Cet élément contribue à l’augmentation de leur CAC, tout comme l'acquisition de stratégies de communication de masse traditionnels (panneaux publicitaires, TV) visant à étendre leurs audiences. Enfin, ils peinent à développer une réelle stratégie omnicanale, leurs options se limitant pour l’instant aux points de vente physiques ou à la distribution indirecte.



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